Dossier: Toxic world
Identifier plus rapidement les composés toxiques
Analyser toutes les substances synthétiques se retrouvant dans l’environnement n’est pas possible en pratique. Trois groupes de recherche suisses développent des approches entièrement nouvelles pour accélérer les tests.
TOUT RÉUNIR DANS UN ORDINATEUR
Shana Sturla, ETH Zurich
Problème: les tests toxicologiques fonctionnent actuellement comme une boîte noire: on mesure ce qui en sort, mais pas ce qui se passe dans l’intervalle.
Solution: l’équipe zurichoise analyse au niveau moléculaire les points d’attaque des substances chimiques. Elle insère les résultats de nombreuses expériences dans des modèles informatiques afin de couvrir l’intégralité des interactions possibles. «Si nous comprenons comment les produits chimiques interfèrent dans les processus biologiques, nous pourrons peut-être prédire leur toxicité sans recourir à des essais sur les animaux», déclare Shana Sturla.
UN APPAREIL DE MESURE DANS LE RUISSEAU
Juliane Hollender, Eawag
Problème: on ne sait pas quels produits chimiques se trouvent dans les eaux, car seul un nombre limité de substances est surveillé.
Solution: la chimiste Juliane Hollender cherche à détecter toutes les substances présentes dans un échantillon d’eau en combinant différentes techniques d’analyse, notamment la spectrométrie de masse et la chromatographie. De grandes bases de données disponibles sur internet permettent ensuite d’identifier de nombreuses molécules. «Nous disposons ainsi d’une image plus précise de l’ensemble des produits présents», dit-elle. Et parfois les propriétés des substances donnent une idée de leur toxicité.
UTILISER DES VERS PLUTÔT QUE DES SOURIS
Matteo Cornaglia, Nagi Bioscience, Lausanne
Problème: tester toutes les nouvelles substances requiert de l’argent, du temps et de nombreux rongeurs de labo.
Solution: le nématode Caenorhabditis elegans, un ver d’un millimètre, est un organisme modèle bien connu qui fonctionne à de nombreux égards comme l’être humain. Le spin-off de l’EPFL Nagi Bioscience a développé une procédure efficace d’essais toxicologiques sur ces vers. Contrairement aux tests faits sur les cultures cellulaires, ils livrent des informations sur les effets d’une substance sur l’organisme entier. «Nous pouvons ainsi constater les effets d’un produit chimique sur toute la vie d’un individu, celle du ver se résumant à deux semaines», explique le directeur Matteo Cornaglia.
Illustrations: 1kilo