L'isolement de ce village de montagne géorgien influence la langue plus que la haute altitude. | Photo: Tomas Malik/Unsplash

Les contacts entre les langues et l’isolement des communautés en altitude sont désormais vus comme des moteurs de la diversité des langages. Une étude de l’Institut de biologie de l’Université de Neuchâtel et de l’Université de Tübingen (Allemagne) met en évidence l’importance des facteurs anthropologiques plutôt qu’environnementaux dans l’évolution des langues.

Point de départ de l’étude, les consonnes éjectives et uvulaires. Les premières sont articulées grâce à la glotte plutôt que par la voie pulmonaire. Rares, émettant un son qui fait «pop», on les entend surtout au sein de communautés vivant en altitude, par exemple dans les Andes, le rift africain ou le Caucase. Les secondes, rares aussi, ont une répartition géographique proche malgré une prononciation bien différente. «Nous voulions vérifier si ces sons sont apparus et ont perduré à cause de l’environnement ou si des facteurs indirects, comme l’isolement relatif des communautés des montagnes, peuvent expliquer leur répartition géographique», résume Steven Moran, professeur assistant à l’Université de Neuchâtel.

L’environnement n’a qu’une influence indirecte sur la dissémination des consonnes en haute altitude.

Les scientifiques ont adopté une approche multidisciplinaire. Ils ont eu recours à une base de données des langues mondiales (Phoible), croisée avec le catalogue de leur répartition géographique (Glottolog) ainsi qu’à des données ayant trait à l’altitude. Puis ils ont utilisé la linguistique computationnelle pour modéliser le développement des deux catégories de sons à travers le temps. Enfin, ils ont étudié en profondeur la littérature ayant trait à l’apparition de ce type de sons.

Résultat: les contacts entre communautés de langages auraient joué un rôle très important dans la dissémination de ces sons en haute altitude. L’environnement ne jouerait donc qu’un rôle indirect, contrairement à ce qu’avançait une théorie récente (Caleb Everett, 2013), qui pointait l’air sec et la pression atmosphérique en haute montagne pour expliquer l’apparition de ces consonnes.

Urban, S. Moran: Altitude and the distributional typology of language structure: Ejectives and beyond. Plos One (2021).