Les élèves peuvent et doivent participer activement à l’amélioration des cours, selon l’enseignant Marcel Hatt. Il suffit de les impliquer en leur posant des questions. | Image: Valérie Chételat

Après avoir découvert la méthode Luuise, vous l’avez mise en oeuvre dans votre établissement. Pourquoi?

Je dirige chez nous le groupe de travail sur l’assurance qualité. J’ai tout de suite trouvé cet instrument intéressant parce qu’il présente une utilité directe dans le quotidien scolaire. Les discussions sur ce qui fait un bon enseignement m’interpellent depuis toujours. C’est aussi lié à l’image que je nourris de mon métier: je ne me vois pas comme un professeur auquel on doit obéir; je conçois au contraire l’enseignement comme un dialogue avec les élèves. Cette passion pour des cours basés sur le partenariat et mes débuts parfois épineux m’ont incité à rester dans le groupe de travail. Lorsque les gymnases zurichois ont reçu des directives en matière de qualité voilà dix-huit ans, le sujet était impopulaire parmi les enseignants.

Pourquoi?

Un grand nombre d’entre eux avaient l’impression qu’on leur imposait une charge supplémentaire faisant juste partie d’une réforme et n’apportant rien au quotidien. Ce scepticisme est lié principalement à nos ressources limitées et je le considère comme tout à fait compréhensible. C’est précisément pour cela que je voulais développer des projets en matière de qualité qui apportent un avantage tangible par rapport au temps investi. A l’instar de Luuise qui s’appuie directement sur le quotidien des enseignants et les aide de manière très directe.

Un exemple?

Cet instrument permet d’aborder des difficultés rencontrées pendant les cours. Un exemple tiré de mon gymnase: une classe éprouvait régulièrement du mal à démarrer la résolution autonome de certaines tâches. Une des enseignantes a émis l’hypothèse que certains élèves ne savaient pas de quelle façon s’y prendre pour commencer leur travail et qu’une structuration des tâches pourrait les aider. En se basant sur Luuise, elle a développé une visualisation de l’amorce du travail.

Concrètement?

C’est quelque chose de très simple: les élèves disposent sur leur pupitre des papiers de trois couleurs qui correspondent aux étapes nécessaires pour le démarrage du travail: un jaune indique qu’ils ont réuni les matériaux nécessaires, un vert qu’ils ont compris la tâche et un bleu qu’ils ont commencé à la résoudre ou identifié le moment où ils se trouvent bloqués en termes de contenu. L’enseignante compte rapidement ces papiers pour repérer combien d’élèves ont atteint telle ou telle étape.

Cette simple mesure a-t-elle fonctionné?

Oui, la classe est parvenue à amorcer de plus en plus rapidement le travail autonome. La discussion des résultats avec les élèves constitue un point important dans ce processus. L’enseignant demandera par exemple: de quoi avez-vous besoin pour que ça marche encore un peu mieux? Cette question transfère la responsabilité de l’enseignant aux élèves, de sorte que ces derniers puissent et doivent participer de manière active. Procéder ainsi a quelque chose d’encourageant: nous reconnaissons et honorons ce qui fonctionne déjà bien, et nous entamons une conversation sur ce qui nous permettrait d’avancer encore ensemble.

En dirigeant des formations continues Luuise, vous voyez des exemples amenés par d’autres enseignants. En profitez-vous à titre personnel?

Oui, je crois. J’ai remarqué que le travail avec cette méthode avait modifié mon comportement dans la communication à l’école. Je thématise les problèmes plus tôt et demande plus souvent ce que je peux faire pour épauler les élèves. Cela désamorce beaucoup de situations potentiellement pénibles avant même qu’elles ne se mettent en place. Et je passe en général plus vite au méta-niveau. Ces changements sont intervenus spontanément, grâce à la réflexion induite par Luuise.