La Russe Olga Trukhina est postdoc and l'EPFL Valais. Elle est opposée à la guerre. | Photo: Sacha Bittel/EPFL

Diverses nationalités collaborent au Laboratoire des matériaux inorganiques fonctionnels de l’EPFL Valais à Sion. La postdoc russe Olga Trukhina travaille par exemple sur des moyens astucieux de récupération de métaux dans les déchets électroniques. L'invasion russe en Ukraine a changé sa vie le 24 février 2022.

Olga Trukhina, la guerre en Ukraine a-t-elle affecté votre vie?

Les agissements de la Russie m’ont réveillée. Avec la guerre, les couleurs habituelles de ma vie ont disparu, divisant tout le monde en noir et blanc – anciens camarades de classe, voisins et amies. Ils étaient soit pour, soit contre la guerre. Je n’ai pas réussi à convaincre mes contacts en Russie qu’il s’agit d’une invasion et d’un crime. J’ai compris: je peux mieux aider en donnant de l’argent à des journalistes indépendants et en aidant des réfugiés.

Y a-t-il eu des réactions hostiles?

Non, jamais. Au début, je craignais que les Ukrainiennes me haïssent. Etre Russe a aujourd’hui quelque chose de toxique. C'est exactement ce que veut notre gouvernement: que nous pensions être détestées pour que nous nous opposions au monde. Mon expérience en Suisse et dans le reste de l’Europe est autre: on ne nous hait pas si nous prenons position et agissons au lieu de nous plaindre de la perte de notre vie d’avant. Personne originaire d’Ukraine n’a été impoli à mon égard depuis la guerre, mais cela rend les choses pires. Quoi que je fasse, c'est simplement insuffisant.

Ne craignez-vous pas d’exprimer votre opposition publiquement?

Il est trop tard pour la peur – l’appareil autocratique va nous dévorer, quoi que nous fassions. La question serait plutôt de savoir si je vais retourner en Russie. Oui, je veux revoir ma famille. Mais en tant que scientifique, je ne vois pas d’avenir dans une Russie qui régresse sur le plan technologique. Les experts qualifiés quittent le pays.

Y a-t-il eu un soutien de l’EPFL?

Oui. Il existe une commission spéciale pour le soutien des réfugiés d’Ukraine. Et une rencontre en ligne avec les Russes et la direction de l'EPFL a eu lieu. L'objectif: réduire l’impact de ce terrible conflit sur l’EPFL. Une aide psychologique a aussi été proposée.

Et vos collègues de recherche?

Ma professeure et mes collègues étaient très compréhensifs – ils n’ont pas posé de questions, mais étaient là quand je voulais parler.

Qu’espérez-vous?

Ce n'est vraiment pas le moment pour nous demander, à nous Russes, ce que nous ressentons. Nous devrions écouter les Ukrainiennes. Sur un plan général, j’espère que l'ensemble des Russes opposés au conflit s’uniront contre ce monstre au lieu de débattre de questions telles que la responsabilité individuelle ou collective. J’espère une victoire de l’Ukraine et la liberté en Russie.