Photo: màd

Nondit Delphine Klopfenstein Broggini.

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Ouidit Lea Caminada.

Le CERN est un fleuron de la recherche scientifique. Genève peut être fière d’abriter cette institution qui fait rayonner la connaissance au niveau mondial. C’est donc en amie de la science que je m’interroge sur ce projet. Non pour en nier l’intérêt, mais parce que toute avancée scientifique doit aussi répondre à une exigence de responsabilité. L’accélérateur représente des dizaines d’années de travaux, des centaines de milliers de mètres cubes excavés, des années de camions qui vont et viennent, des champs éventrés. Les estimations parlent de plusieurs dizaines de milliards de francs pour la construction, sans compter l’entretien ou les coûts énergétiques ultérieurs. Le projet nécessiterait l’équivalent de la moitié de la consommation annuelle du canton de Genève. Dans un monde qui doit répondre à l’urgence climatique, peut-on défendre un tel projet sans s’interroger?

«Dans un monde qui doit désormais répondre à l’urgence climatique, peut-on défendre un tel projet sans s’interroger?»

La question démocratique doit aussi être posée. Le Conseil fédéral a lancé une procédure de consultation sur le plan sectoriel du CERN. Le texte n’est pas soumis à référendum, une aberration dans le système politique suisse. Pour un projet d’une telle ampleur, une décision sans débat public est plus que problématique. Je crois à une science ouverte et partagée, pas à une planification faite en catimini et sans l’approbation des populations concernées. La science a principalement besoin de moyens pour affronter les crises actuelles de notre système, climatiques, sociales et économiques. Au vu de ce contexte, l’extension du CERN semble manquer sa cible, à l’heure où la légitimité même de la science est remise en cause de façon inquiétante. Le progrès ne se mesure pas seulement à l’aune de la prouesse technologique, mais aussi à sa capacité à être compris, partagé et porté collectivement.

Loin d’être uniquement idéologique, ma position est très pragmatique. Elle se base sur la vision d’une science qui ne se déconnecte pas du quotidien des gens, mais qui respecte les citoyennes et citoyens, la démocratie, la biodiversité de nos régions et le climat autant que la curiosité humaine.

Delphine Klopfenstein Broggini est conseillère nationale pour Les Vert·e·s genevois·e·s et elle s’engage depuis quelques années dans les débats sur le Future Circular Collider.

En tant que physicienne des particules, je suis enthousiasmée par le concept du Futur Circular Collider (FCC), qui ouvre de nouvelles possibilités d’explorer des questions majeures sur notre univers. La recherche fondamentale repose sur la curiosité. Elle ne vise pas des applications pratiques immédiates, mais sert à acquérir des connaissances plus approfondies. Ce sont souvent les découvertes sans utilité évidente au départ qui mèneront à d’importants progrès. La physique des particules, en particulier la recherche au CERN, en fournit de nombreux exemples, comme l’utilisation de faisceaux de particules pour traiter le cancer, l’usage de détecteurs pour l’imagerie ou le développement de l’Internet.

«L’Europe est à la pointe de la recherche sur les particules. Avec le FCC, elle le resterait dans les prochaines décennies.»

Des gens du monde entier travaillent au CERN pour développer, ensemble, de nouvelles expériences et technologies. Il représente un modèle de coopération internationale fructueuse et pacifique, et contribue de façon décisive à la réputation de la Suisse comme pôle de recherche scientifique de pointe. De plus, c’est un partenaire économique intéressant pour le pays: les commandes passées à l’industrie et aux prestataires de services rapportent jusqu’à trois fois la contribution annuelle au CERN de la Suisse.

La construction de l’accélérateur présente donc aussi un intérêt économique. Et le CERN est un lieu de formation qui, en collaboration avec des universités et des instituts de recherche, fera éclore la prochaine génération de spécialistes en physique, en ingénierie ou encore en science des données. La science suisse en profite largement. Le FCC est un projet extrêmement ambitieux. Il ne peut que l’être s’il entend mener à des découvertes révolutionnaires. Il propose un programme de physique global et unique au monde. L’Europe, à la pointe de la recherche sur les particules, le resterait dans les prochaines décennies avec le FCC. Le projet renforce l’idée – particulièrement importante à notre époque – d’un progrès partagé grâce à la collaboration. L’Europe et la Suisse attirent ainsi des talents du monde entier dont les travaux innovants profitent à toutes et tous.

Lea Caminada est responsable du groupe de physique des hautes énergies à l’Institut Paul Scherrer (PSI) et professeure à l’Université de Zurich. Elle-même dirige des recherches au CERN.

Photo: màd

Nondit Delphine Klopfenstein Broggini.

Le CERN est un fleuron de la recherche scientifique. Genève peut être fière d’abriter cette institution qui fait rayonner la connaissance au niveau mondial. C’est donc en amie de la science que je m’interroge sur ce projet. Non pour en nier l’intérêt, mais parce que toute avancée scientifique doit aussi répondre à une exigence de responsabilité. L’accélérateur représente des dizaines d’années de travaux, des centaines de milliers de mètres cubes excavés, des années de camions qui vont et viennent, des champs éventrés. Les estimations parlent de plusieurs dizaines de milliards de francs pour la construction, sans compter l’entretien ou les coûts énergétiques ultérieurs. Le projet nécessiterait l’équivalent de la moitié de la consommation annuelle du canton de Genève. Dans un monde qui doit répondre à l’urgence climatique, peut-on défendre un tel projet sans s’interroger?

«Dans un monde qui doit désormais répondre à l’urgence climatique, peut-on défendre un tel projet sans s’interroger?»

La question démocratique doit aussi être posée. Le Conseil fédéral a lancé une procédure de consultation sur le plan sectoriel du CERN. Le texte n’est pas soumis à référendum, une aberration dans le système politique suisse. Pour un projet d’une telle ampleur, une décision sans débat public est plus que problématique. Je crois à une science ouverte et partagée, pas à une planification faite en catimini et sans l’approbation des populations concernées. La science a principalement besoin de moyens pour affronter les crises actuelles de notre système, climatiques, sociales et économiques. Au vu de ce contexte, l’extension du CERN semble manquer sa cible, à l’heure où la légitimité même de la science est remise en cause de façon inquiétante. Le progrès ne se mesure pas seulement à l’aune de la prouesse technologique, mais aussi à sa capacité à être compris, partagé et porté collectivement.

Loin d’être uniquement idéologique, ma position est très pragmatique. Elle se base sur la vision d’une science qui ne se déconnecte pas du quotidien des gens, mais qui respecte les citoyennes et citoyens, la démocratie, la biodiversité de nos régions et le climat autant que la curiosité humaine.

Delphine Klopfenstein Broggini est conseillère nationale pour Les Vert·e·s genevois·e·s et elle s’engage depuis quelques années dans les débats sur le Future Circular Collider.

 


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Ouidit Lea Caminada.

En tant que physicienne des particules, je suis enthousiasmée par le concept du Futur Circular Collider (FCC), qui ouvre de nouvelles possibilités d’explorer des questions majeures sur notre univers. La recherche fondamentale repose sur la curiosité. Elle ne vise pas des applications pratiques immédiates, mais sert à acquérir des connaissances plus approfondies. Ce sont souvent les découvertes sans utilité évidente au départ qui mèneront à d’importants progrès. La physique des particules, en particulier la recherche au CERN, en fournit de nombreux exemples, comme l’utilisation de faisceaux de particules pour traiter le cancer, l’usage de détecteurs pour l’imagerie ou le développement de l’Internet.

«L’Europe est à la pointe de la recherche sur les particules. Avec le FCC, elle le resterait dans les prochaines décennies.»

Des gens du monde entier travaillent au CERN pour développer, ensemble, de nouvelles expériences et technologies. Il représente un modèle de coopération internationale fructueuse et pacifique, et contribue de façon décisive à la réputation de la Suisse comme pôle de recherche scientifique de pointe. De plus, c’est un partenaire économique intéressant pour le pays: les commandes passées à l’industrie et aux prestataires de services rapportent jusqu’à trois fois la contribution annuelle au CERN de la Suisse.

La construction de l’accélérateur présente donc aussi un intérêt économique. Et le CERN est un lieu de formation qui, en collaboration avec des universités et des instituts de recherche, fera éclore la prochaine génération de spécialistes en physique, en ingénierie ou encore en science des données. La science suisse en profite largement. Le FCC est un projet extrêmement ambitieux. Il ne peut que l’être s’il entend mener à des découvertes révolutionnaires. Il propose un programme de physique global et unique au monde. L’Europe, à la pointe de la recherche sur les particules, le resterait dans les prochaines décennies avec le FCC. Le projet renforce l’idée – particulièrement importante à notre époque – d’un progrès partagé grâce à la collaboration. L’Europe et la Suisse attirent ainsi des talents du monde entier dont les travaux innovants profitent à toutes et tous.

Lea Caminada est responsable du groupe de physique des hautes énergies à l’Institut Paul Scherrer (PSI) et professeure à l’Université de Zurich. Elle-même dirige des recherches au CERN.